Vincent Malausa發表于《電影手冊》2022年11月刊。

《傑克·凱尤奇事》通過一種令人側目而非為人重視的方式為有點愚蠢的作者傳統與法國電影界中類型電影之間的沖突提供了一種解決方案。盧卡斯·德拉倫格爾(Lucas Delangle)的第一部長片基于自然主義的方法拍攝了一位年輕男人傑克(Thomas Parigi飾)和他的祖母的日常生活,以及阿爾卑斯山谷中一個與世隔絕小村莊中的沒有正式資格的女行醫者、磁療師Gisèle(Edwige Blondiau飾),這種自然主義的方法使影片的第一部分看起來像是耐人尋味的新現實主義的對象。從親密的家庭關系的場景到(其他鄉村醫生的)土法接骨儀式,影片在既熟悉又陌生的農民的現實的夾縫中徘徊。在熱情的惡意與好奇的距離之間,在接近對象與記錄的陌生化的微妙矛盾之間,德拉倫格爾拍攝他的人物,迅速展現出常态與神秘之間、日常性與純粹不協調之間的模糊邊界。

影片通過從一個散文詩般的現實到另一個更微妙更無法捉摸的現實的跳躍、謹慎的中斷、不可見的跳轉,将這些漸變效果作為叙事的原則(小插曲,在年輕英雄的房間裡,他在傳統歌聲與神秘祈禱之間實驗磁性聲音)。墓地的場景,預示着Gisèle在幾組鏡頭後的突然死亡,是使影片走向一種更奇異開放維度的第一種方式。然後,一個完全不同的故事開始:我們看到傑克·凱尤,現在他是孤獨的孤兒,鐘情于一個“病人”Elsa,堅持治療蔓延在這個怯生女孩後背白色皮膚上的黑色腫瘤般的奇怪斑點。Elsa無瑕蒼白的面龐,她在年輕巫師學徒的家和森林(那裡每天晚上有兇殘的狼在那裡遊蕩并吞食野獸)之間的往返,成為影片所圍繞而展開的最大謎團。

沒有預兆地,但也從來沒有強迫轉向黑暗的細緻效果,影片披上了充滿沉重的抒情與焦慮力量的恐怖情節劇的外衣,如果說這種不安的力量在大部分時間是被壓制的(給予這個由Thomas Parigi完美扮演的角色擁有所有堅持與神秘的力量),于是這種力量在晦澀又富有亮點的詩意場景爆發出來——年輕的野孩子變成半女半狼、森林中的吻與幽靈、傑克的房子變成抵抗村民跟蹤她的堡壘等。如果這部電影不再隐藏其狼性寓言的維度,那麼它通過高傲地保持依附于其現實主義原則的方式(并非将類型強加于電影,這裡也沒有神聖不可侵犯的轉換鏡頭)來震撼觀衆,特别是在通過隔在現實世界與純粹夢幻的、以一種諷刺的普魯斯特式的囚禁方式關押着狼的洞穴/卧室之間的門的對抗中,以上特性得以淋漓盡緻地顯現。

如果說這部電影把自己置于印象主義與現實主義之間,那是因為這部電影的奇妙論點是圍繞與世界關系的問題,而非與電影關系或與圖像關系的問題。直到最終的“奇迹”,影片回應了純粹的信仰制度,在這個制度中,天賦(don)的問題(自我的天賦和代代傳承的魔力天賦)值得作為存在主義的——甚至是自我犧牲的——原則,而不是作為所指的轉變。《傑克·凱尤奇事》不僅僅是“法國幻想”的無數次嘗試,它首先是對一種激情的赤裸的、令人生畏的記錄以及一個啟蒙的故事:這種啟蒙超越了所有的偶然性(美學,叙事或類型),引向一種在《傑克·凱尤奇事》簡單的、低調來自神示的生活中的對瘋狂愛情的揭示。

Publié le 2 novembre 2022 par Vincent Malausa

Au conflit qui oppose un peu bêtement tradition auteuriste et cinéma de genre dans le petit monde de la production française, Jacky Caillou apporte une solution en forme de saisissant pas de côté. Suivant le quotidien d'un jeune homme, Jacky (Thomas Parigi), et de sa grand-mère, Gisèle (Edwige Blondiau), guérisseuse et magnétiseuse dans un petit village isolé d'une vallée des Alpes, le premier long métrage de Lucas Delangle s'inscrit dans un naturalisme de terroir qui donne à sa première partie des airs d'intrigant objet néoréaliste. De scènes d'intimité familiale en scènes d'initiation aux rituels des rebouteux - ces autres médecins de campagne -, le film louvoie dans les interstices d'une réalité paysanne à la fois familière et méconnue. Pris dans un écart de chaleureuse malice et de distance curieuse, Delangle filme ses personnages en un paradoxe subtil de proximité et d'étrangeté documentaire qui rend rapidement illisibles les frontières entre normalité et mystère, quotidienneté et pure incongruité.

Ces effets de glissement, Jacky Caillou en fait le principe d'un récit progressant par petits bonds, discrètes ruptures, invisibles sautillements d'une réalité prosaïque à une autre, à la fois plus ténue et plus intangible (les intermèdes où, dans sa chambre, le jeune héros expérimente des sons magnétiques en un croisement de chants traditionnels et de prières mystiques). La scène au cimetière, qui préfigure la mort soudaine de Gisèle quelques séquences plus tard, est une première manière d'amorcer le mouvement du film vers une dimension plus ouvertement fantastique. Débute alors un tout autre récit : celui qui voit Jacky Caillou, désormais seul et orphelin, s'éprendre d'une « patiente », Elsa, et s'obstiner à soigner l'étrange tache qui s'étend, telle une tumeur noire, sur la peau blanche du dos de la farouche jeune femme. La pâleur immaculée du visage d'Elsa, ses allers-retours entre la maison du jeune apprenti sorcier et la forêt qui l'environne (où rôde un loup dévorant des bêtes chaque nuit), deviennent le grand mystère autour duquel s'enroule tout le film.

Sans crier gare, mais sans jamais forcer ses minutieux effets de dévalement vers les ténèbres, Jacky Caillou prend alors les atours d'un mélodrame d'épouvante plein d'un lyrisme sourd et d'une puissance d'inquiétude qui, si elle demeure le plus souvent rentrée (donnant au personnage admirablement interprété par Thomas Parigi toute sa force d'entêtement et de mystère), explose lors de scènes d'un obscur éclat poétique - la jeune sauvageonne devenue mi-femme mi-louve, le baiser et les apparitions dans la forêt, la maison de Jacky transformée en forteresse face aux habitants du village traquant la créature, etc. Et si le film ne cache plus sa dimension de fable lycanthrope, c'est par sa manière de rester fièrement attelé à son principe de réalisme (pas de figure imposée du genre ni de sacro-sainte séquence de transformation ici) qu'il frappe, le temps notamment d'un affrontement par porte interposée opposant au monde réel celui, purement onirique, de la cave/chambre où la louve est tenue captive, à la manière d'une ironique prisonnière proustienne.

S'il se maintient entre impressionnisme et naturalisme, c'est que Jacky Caillou fait de son argument fantastique une affaire de rapport au monde bien plus que de rapport au cinéma et aux images. Jusqu'à son « miracle » final, le film répond à un régime de croyance pure où la question du don (don de soi et don de sortilège transmis de génération en génération) vaut comme principe existentiel - et même sacrificiel - plutôt que comme décalque référentiel. Bien plus qu'une énième tentative de « fantastique à la française », Jacky Caillou est d'abord la chronique nue et redoutable d'une passion et le récit d'une initiation : celle menant, par-delà toute contingence (esthétique, narrative ou de genre), à la révélation d'un amour fou dans la vie simple et discrètement oraculaire de Jacky Caillou.

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